Et si on partageait les tâches ?

Partage des tâches : cuisiner ensemble

Avez-vous déjà remarqué que lorsqu’on parle d’alimentation infantile, on s’adresse surtout aux mamans ? Même si les mentalités tendent à changer, l’image de la mère « nourricière » est toujours ancrée dans l’imaginaire collectif. Et pour cause: en France, les femmes consacrent 2,5 fois plus de temps aux tâches ménagères que les hommes ! Mais alors, que font les papas ?

Partage des tâches et repas de bébé

Sur ce blog, je traite les questions d’organisation autour des repas de bébé, et de la famille, afin de simplifier notre quotidien. S’organiser pour quoi ? Gagner du temps, se libérer l’esprit, et partager en famille. Alors quoi de plus naturel que de parler du partage des tâches, et de l’implication des papas dans la diversification alimentaire, pour arriver à ces fins ?

Pour écrire cet article, je me suis beaucoup appuyée sur des témoignages de parents, notamment dans mon entourage. Parmi eux, j’ai interrogé des mamans ET des papas, sur leur implication dans la gestion des repas de bébé. Et afin d’illustrer mes propos, Olivier du blog « Je suis papa », qui s’engage dans la campagne #DoItTogether pour l’égalité des sexes, a accepté de répondre à mes questions.

La (sur)charge mentale

Avez-vous lu la BD d’Emma, « Fallait demander » ? Ces dessins ont fait un méga buzz médiatique, et ont permis d’enfin parler de la « charge mentale ». Qu’est-ce que la charge mentale ? Selon Anne Solaz et Ariane Pailhé, chercheuses de l’Ined à l’origine de cette terminologie, la charge mentale fait référence à une « surcharge pesante moralement et physiquement ». Elle serait le résultat d’une difficulté à gérer les sphères professionnelle et privée, cette surcharge étant plus importante pour les femmes ayant un enfant âgé de moins de 3 ans. Avec la diffusion de la BD d’Emma « Fallait demander », cette définition s’est progressivement précisée sur l’effort cognitif de penser à demander à son conjoint d’aider à la maison, car ce dernier n’en prend pas l’initiative.

Charge mentale et diversification alimentaire

La période de diversification alimentaire de votre enfant peut encore augmenter la charge mentale quotidienne. Comment se manifeste-t-elle ? La plupart des parents se posent alors des milliers de questions sur l’alimentation de la personne la plus importante de leur vie, car cela aura une incidence sur sa santé future, ses goûts, son développement. Mais surtout, les parents sont surchargés par la peur de mal faire.

Quand commencer ? Comment s’y prendre ? Quels aliments introduire en premier ? Que faire en cas de rejet ? Autant de questions auxquels tous les parents sont soumis. (Olivier, « Je suis papa« )

Toutes ces questions nécessitent recherche d’informations, de conseils, prospection et action ! Et bien souvent, ce sont les mères qui en prennent la charge. Et comme c’est elles qui s’y intéressent, c’est aussi (généralement) elles qui organisent les repas et cuisinent! Pour en témoigner, jetez un oeil à cette publication instagram par @mapetiteassiette. Quand elle demande « que font les papas? », les commentaires répondent:

Ici papa ne fait pas la cuisine mais approuve l’alimentation.

Nous on s’occupe de tout ensemble … sauf les repas. Je fais tout maison, lui serait plus petits pots si je ne cuisinais pas.

De mon côté si mon mari s’occupait des repas, ce serait pâtes ketchup à tous les repas !
Chez moi, le papa prépare peu le repas et quand il le fait on a droit au maximum de calories.
Ici c’est maman qui cuisine principalement, peut-être parce que j’aime un peu trop ça pour déléguer.

Alors, comment amener son conjoint à prendre l’initiative de s’engager dans des tâches domestiques, et en particulier en cuisine ?

La question de l'égalité des sexes

Prendre l’initiative d’aider à la maison n’est pas qu’une question de bonne volonté. Même si papa émet l’intention de vouloir aider plus à la maison, quelque chose semble l’en empêcher. « La prochaine fois c’est moi qui fais la lessive ». Pourquoi ne la fait-il pas alors que le linge sale s’entasse ?

Si les tâches ménagères sont inégalement réparties dans un couple, c’est en partie pour des raisons socioculturelles bien ancrées. Par exemple, le congé paternité est beaucoup plus court que le congé maternité: cela ne facilite pas la prise d’initiative, ni l’implication dans les tâches « parentales ». 

Tiens, prends-le !

Ah mince, il est au travail.

De plus, certaines tâches nécessitent des compétences. Par exemple, si papa ne sait pas quel programme utiliser pour le linge, il risque la catastrophe. Certaines mamans se sentent alors contraintes de prendre le relais, de peur que leur conjoint le fasse moins bien… Et plus une pratique est enracinée, plus il est difficile de la changer !

Donc, comment faire en sorte d’arriver petit à petit à un équilibre entre hommes et femmes sur la question des tâches ménagères ? Et, pourquoi est-ce important ? Car la question du partage des tâches domestiques au sein de la famille reflète directement notre vision de l’égalité des sexes

Alors, pour se diriger vers un équilibre et favoriser la prise d’initiatives, il est nécessaire de modifier le contexte. Changer d’environnement pour voir se modifier les comportements. Et même si notre société progresse sur la question de l’égalité des sexes, il nous reste encore de gros efforts à accomplir pour faire évoluer le contexte dans lequel on voudrait vivre, pour aboutir à d’avantages d’égalité entre femmes et hommes. C’est donc à nous, parents, de faire évoluer le modèle que nous montrons à nos enfants !

La place du père

Lorsque j’ai commencé à regarder les statistiques des mes lecteurs pour ce blog, les chiffres m’ont interpellée: 81,8% de mes lecteurs, ou plutôt de mes lectrices, sont des femmes ! Et sur mon compte Instagram, c’est la même chose avec 83% d’abonnées de sexe féminin. Est-ce que cela voudrait dire que l’alimentation infantile intéresse surtout les mères ? Or, pour prendre l’initiative de faire un tâche ménagère, il me semble qu’il faut y trouver un intérêt. Pourquoi faire quelque chose qui n’a pas de sens pour nous ? Je me demande alors: pourquoi les pères ont si peu d’intérêt pour ce que mange leur bébé ?

Heureusement, des papas sont là pour agir à atténuer ces différences. Si j’ai 81,8% de lectrices, cela veut dire que j’ai 18,2% de lecteurs. De papas qui s’intéressent à l’alimentation de leurs enfants. De papas qui cherchent à s’impliquer. Mais pourquoi si peu ?

D’une manière générale, la parentalité est encore envisagée comme le pré-carré des mamans. Dans la pub, dans les discours des entreprises et des institutionnels, à l’école, dans les établissements de soin… les mères sont perçues comme les parents par défaut. Et les pères comme les seconds. Cette représentation éculée nuit à une réelle égalité f/h. Elle contribue à empêcher les mères de devenir les femmes qu’elles aimeraient être, et les hommes à être les pères qu’il souhaiteraient devenir. (Olivier, « Je suis papa« )

Pour faire évoluer les mentalités et cette vision de la parentalité, agissons ! Et comme nous sommes plus forts à deux, faisons équipe !

Etablir un dialogue

Le maître mot pour permettre un partage des tâches équitable au sein du couple: la discussion. Parlez-en ! Car le partage des tâches n’est pas inné, car nous ne partageons pas les mêmes priorités en matière de gestion du quotidien, car nous n’avons pas les mêmes critères de propreté, il est nécessaire d’établir un dialogue avec son conjoint. D’établir ensemble la liste des priorités. De discuter des façons de procéder. De prendre en compte les emplois du temps respectifs. De parler du rôle de chacun. Et surtout, car notre environnement change et nos humeurs fluctuent, il ne suffit pas d’en parler une seule fois. Il faut dialoguer avant que la situation ne devienne conflictuelle. 

La question du partage des tâches revient souvent sur la table au moment de la naissance du premier enfant. On en a pris conscience rapidement car l’arrivée de notre fille a bousculé nos habitudes, bien au-delà du moment du repas. Mais là encore, c’est le dialogue et l’écoute mutuelle qui nous ont permis d’élaborer nos routines pour qu’aucun de nous deux ne subissent une situation imposée par l’autre. (Olivier, « Je suis papa« )

Partage des tâches à la maison

Enfin, il ne faut pas oublier qu’il ne peut pas y avoir de rapport mathématiquement exact. Au lieu de regarder ce qui manque, commençons par regarder ce qui est donné. Reconnaissons ce qu’accomplit notre conjoint ! 🙂 Partager les tâches, cela nécessite de valoriser les compétences et les possibilités de chacun, tout en allégeant la charge de travail. 

Si nous pensons agir de manière globalement équitable au sein de notre foyer, le dogme qui voudrait que l’égalité soit totale n’a que peu de sens pour nous. Nous préférons nous appuyer sur les compétences de l’un ou de l’autre, tant que la situation est mutuellement acceptée. L’équilibre doit pour nous s’évaluer sur la globalité des tâches à accomplir. (Olivier, « Je suis papa« )

Dans mon prochain article, je vous donne 5 idées simples à actionner pour partager les tâches en cuisine

Le conseil d'Olivier

Je ne peux donner qu’un conseil aux papas (et aux mamans) : apprenez à vous écouter et à dialoguer. Ouvrez votre cœur, montrez vous humble et sincère avec vous-même et avec elle. Soyez bienveillant, même lorsque vous avez un sujet crispant à aborder. Et n’oubliez jamais que vous vous aimez et que vous œuvrez avant tout pour votre enfant. 

Et vous, comment se passe le partage des tâches dans votre foyer ? Est-ce que papa est partie prenante dans la diversification alimentaire de votre bébé ?

Interview de Olivier (Je suis papa)

LA DIVERSIFICATION
La diversification alimentaire pour votre fille s’est-elle déroulée naturellement, ou, comme la plupart des parents, vous êtes-vous beaucoup posé la question du « quoi / quand / comment » ? Dans ce cas, qui a pris la charge de se renseigner sur le sujet ? Etait-ce partagé ? En avez-vous discuté ensemble pour savoir comment vous y prendre ?
 
On s’est posé pas mal de questions. Quand commencer ? Comment s’y prendre ? Quels aliments introduire en premier ? Que faire en cas de rejet ? Autant de questions auxquels tous les parents sont soumis. Comme pour tout ce qui concerne notre fille, nous prenons les décisions ensemble, après en avoir discuté parfois longuement. Parfois, on s’est aussi appuyé sur les conseils de professionnels, lorsque nous ne trouvions pas d’issue. De quoi alimenter notre réflexion pour élaborer notre propre solution. Celle qui correspond à nos aspirations, aux besoins de notre enfant, et à nos propres contraintes.
 
AU QUOTIDIEN
Avez-vous discuté en couple du partage des tâches en cuisine, pour vos repas, et pour ceux de votre enfant (quand elle ne mangeait pas encore la même chose que vous)? 
 
La question du partage des tâches revient souvent sur la table au moment de la naissance du premier enfant. On en a pris conscience rapidement car l’arrivée de notre fille a bousculé nos habitudes, bien au-delà du moment du repas. Mais là encore, c’est le dialogue et l’écoute mutuelle qui nous ont permis d’élaborer nos routines pour qu’aucun de nous deux ne subissent une situation imposée par l’autre. 
 
Aviez-vous des contraintes (par exemple, de temps) ou des aspirations qui ont fait que la cuisine est plutôt devenue le domaine de l’un ou de l’autre ?
 
Si nous pensons agir de manière globalement équitable au sein de notre foyer, le dogme qui voudrait que l’égalité soit totale n’a que peu de sens pour nous. Nous préférons nous appuyer sur les compétences de l’un ou de l’autre, tant que la situation est mutuellement acceptée. L’équilibre doit pour nous s’évaluer sur la globalité des tâches à accomplir. 
 
Finalement, qui s’occupe des repas, comment est-ce partagé chez vous ? (idées de repas, courses, qui se met aux fourneaux, qui donnait à manger à votre fille?)
 
Concrètement, je ne suis pas un cordon bleu. Quand on a besoin d’un plat rapide, ou quand ma femme rentre tard, c’est moi qui m’y colle. Quand on a envie d’un plat élaboré ou quand je rentre tard, c’est ma femme qui s’en occupe. Pendant ce temps là, l’autre supervise la douche ou les devoirs, commence une activité avec notre fille, s’occupe du linge, gère l’administratif, ou prépare l’apéro pour tout le monde 🙂 
 
LA PLACE DU PERE
As-tu le sentiment d’avoir été partie prenante dans la diversification alimentaire de ta fille ?
 
Oui, dés le début, grâce à la conviction de ma femme de la nécessité de penser l’éducation de notre fille ensemble. Nous sommes deux parents, nous pensons et agissons à deux. Même s’il nous arrive pourtant de ne parfois pas être d’accord. Une chose est sûre : aucune de nos deux voix n’a plus d’importance que l’autre. Et la question du genre n’a pour nous rien à voir là-dedans.  
 
Si oui, de quelle façon t’es tu impliqué ? As-tu des conseils à donner aux autres papas ?
 
En participant au choix des plats, à leur élaboration. En donnant à manger ma fille. En m’interrogeant sur nos réussites et nos échecs. En partageant avec ma femme mes réflexions pour avancer. En cherchant des informations sur le sujet. En interrogeant mes connaissances et des professionnels. En partageant avec ma femme mes angoisses et mes craintes. Je ne peux donner qu’un conseil aux papas (et aux mamans) : apprenez à vous écouter et à dialoguer. Ouvrez votre cœur, montrez vous humble et sincère avec vous-même et avec elle. Soyez bienveillant, même lorsque vous avez un sujet crispant à aborder. Et n’oubliez jamais que vous vous aimez et que vous œuvrez avant tout pour votre enfant. 
 
As-tu l’impression que les sources d’information sur l’alimentation de bébé sont trop orientés pour les mamans, et qu’on oublie bien souvent les papas ? (blogs de recettes, livres sur la diversification, articles sur la nutrition des bébés, marques de petits pots)
 
D’une manière générale, la parentalité est encore envisagée comme le pré-carré des mamans. Dans la pub, dans les discours des entreprises et des institutionnels, à l’école, dans les établissements de soin… les mères sont perçues comme les parents par défaut. Et les pères comme les seconds. Cette représentation éculée nuit à une réelle égalité f/h. Elle contribue à empêcher les mères de devenir les femmes qu’elles aimeraient être, et les hommes à être les pères qu’il souhaiteraient devenir. 
 
ET SI…
Et si c’était à refaire (un 2e enfant ? Non, j’ai lu ton article disant pourquoi tu n’en auras qu’un !), changerais-tu des choses sur votre organisation ? Quoi ?
 
Non, je ne changerai probablement rien dans notre organisation dans sa globalité. Mais j’affinerai quelques aspects. J’essayerai de devenir moins exigeant avec moi-même pour me défaire encore davantage de cette culpabilité que beaucoup de jeunes parents connaissent. Mais pour ça, il faut de l’expérience. 

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